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Algérie-Egypte : Le web allume la mèche

Le portail israélien Guysen se délectera de la tournure prise par les événements et notera que «le panarabisme ne résiste pas au nationalisme footballistique». Le stade reste l’unique alternative au chômage, à la harqa, et à la hogra.

Le portail israélien Guysen se délectera de la tournure prise par les événements et notera que «le panarabisme ne résiste pas au nationalisme footballistique». Le stade reste l’unique alternative au chômage, à la harqa, et à la hogra.

Quelques jours avant le match Algérie-Egypte du Caire, le magicien tunisien du ballon rond, Tarek Dhiab, le disait déjà : «Ce match dépasse déjà le cadre sportif, il est en train de prendre des allures de guerre. C’est en tout cas comme ça que je le vois. Ce match est pire qu’une guerre». Il ne croyait pas si bien dire. La suite des événements lui a donné raison au-delà de toute… désespérance.

La presse de caniveau des deux pays a répandu ses égouts. Les médias ont allumé la mèche. Et même le web a été mis à contribution. Le net a endossé le rôle de la radio 1000 collines rwandaise, de sinistre mémoire. Les leçons de l’épisode macabre de ce génocide entre frères n’ont pas été retenues.

Un animateur égyptien en vient même à appeler au meurtre des Algériens vivant en Egypte pour venger ses compatriotes «tombés au Soudan». Les journaux algériens multiplient les harangues et les slogans guerriers. «Les supporters de l’équipe d’Algérie vont déferler sur Khartoum comme des criquets avec un esprit de revanche non dissimulé» lit-on. En une référence (involontaire ?) aux invasions moyenâgeuses.

Les uns en font une question d’honneur, évoquent une femme de leur pays dénudée par les services de sécurité de l’adversaire. Les autres répliquent qu’une des leurs a été frappée à la tête par les supporters adverses… Info, intox, difficile de faire la part des choses dans une atmosphère électrique propice à la désinformation la plus échevelée. Le web 2.0 devient le mégaphone de sinistres individus délirant dans une logorrhée haineuse.

Un supporter algérien déclarera même sur facebook : «on ne veut plus participer à la Coupe du Monde, on veut venger les nôtres». Le quotidien panarabe «Al Hayat» fera remarquer que «les prix des couteaux et des canifs avaient doublé sur les marchés de la ville, en raison de la forte demande des supporters».

«Ce match dépasse déjà le cadre sportif» a dit Tarek. Une agence de presse rapporte que «l’Egypte a exprimé jeudi son “indignation extrême” face aux “agressions” contre ses supporters. Un message fort sera également adressé à l’ambassadeur concernant la communauté et les intérêts égyptiens à Alger». Les intérêts égyptiens ? Le portail économique econostrum indique que «le groupe égyptien Orascom Télécom a fait l’objet mardi 17 novembre d’un redressement fiscal de 596,6 millions de dollars». Comme si la mise à sac de ses boutiques ne suffisait pas, une campagne de boycott des puces Djezzy aurait même démarré.

Surmédiatisé, saturant les réseaux sociaux de vidéos, le match Algérie-Egypte a démontré que le pire est possible. Un jeune égyptien, dans un acte courageux d’apaisement déclarera pourtant «son amour des Algériens» et «sa honte d’être Egyptien pour ce que ses compatriotes ont fait vivre aux Maghrébins».
Soulignant que ces actes n’ont été accomplis que par une infime minorité, rappelant au passage, que le taux d’analphabétisme est de 60% en Egypte. La surreprésentation du football dans les médias du monde arabe, couplée parfois à la volonté politique des décideurs, contribue à faire de ce sport la préoccupation et surtout, le dérivatif numéro un des jeunes.

Le portail israélien Guysennews se délectera de la tournure prise par les événements et notera que «le panarabisme ne résiste pas au nationalisme footballistique». Et nos médias font mine d’oublier, pour l’occasion, une réalité dérangeante. Dans le monde arabe, les violences extrêmes ne sont pas rares, même lors de matchs opposant des équipes locales. Nos supporters n’ont pas attendu ce choc des éliminatoires pour la Coupe du Monde pour se déchirer à couteaux tirés.

Dans un contexte social miné par le chômage, le stade reste l’unique alternative à la harqa, et à la hogra. Alors cap au sud vers le Soudan. Et pour une fois, les jeunes en question ont été détournés des radeaux visant le nord de la Méditerranée. Et voici qu’on apprend que de nouvelles émissions vont être concoctées,
en Tunisie même, avec pour thème central, le football.


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