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Film La voix de Hind Rajab : pour qu’on n’oublie jamais les appels au secours de Gaza

Film La voix de Hind Rajab : pour qu’on n’oublie jamais les appels au secours de Gaza

Il y’ a des voix qui te hantent. Qui peuvent résonner longtemps dans ta tête, même des jours après les avoir écouter pour la première fois. Des voix qui réveillent en toi un sentiment de tendresse et d’attachement et dans ce cas précis, beaucoup, beaucoup d’impuissance et de culpabilité..

La voix de Hind Rajab fait partie de ces voix, témoins d’un génocide, reflet de l’incapacité d’agir face à une injustice, qu’on observe en temps réel via les canaux numériques. Désarmés, on écoute cet appel au secours qui vient d’une Gaza qu’on éradique en détruisant ses bâtiments, ses fondements et ses habitants.

Plusieurs formes d’expressions artistiques ont été créées sur le meurtre de Hind Rajab et de sa famille, coincés dans leur voiture et ciblés par des tirs des chars israéliens, et ce depuis la découverte de leurs corps, 12 jours après leur mort le 29 janvier 2024.

Un documentaire d’Al Jazeera intitulé “The Night Won’t End: Biden’s War on Gaza”, réalisé en septembre 2024, a retracé ce meurtre, en se basant sur les témoignages de sa mère et les membres du Croissant Rouge Palestinien.

Les enregistrements téléphoniques entre la petite fille de 6 ans Hind Rajab et le Croissant Rouge Palestinien (Palestine Red Crescent society الهلال الاحمر الفلسطيني) et des vidéos, qui ont été diffusés sur les réseaux sociaux de l’organisation, ont été inclus dans le documentaire d’Al Jazeera.

Une chanson du rappeur américain Macklemore intitulée Hind’s Hall a été mise en ligne en mai 2024. Cette chanson de protestation en l’honneur de Hind Rajab est écrite également en soutien aux manifestations des étudiants qui ont rebaptisé Hamilton Hall de l’Université de Columbia en Hind’s Hall.

La réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania s’inspire de cette histoire pour réaliser son long-métrage intitulé “La voix de Hind Rajab”, sorti en septembre 2025. Ce film se présente comme un documentaire fiction basé sur des faits réels. Il est porté par les acteurs palestiniens Saja Kilani, Clara Khoury, Motaz Malhees et Amer Hlehel.

Fidèle à son approche cinématographique, qu’on a déjà remarquée dans ses films comme “La Belle et la Meute’, “Les filles d’Olfa” ( César du meilleur film documentaire en 2024),  ” L’Homme qui a vendu sa peau” ou “Zaineb n’aime pas la neige”, la réalisatrice reprend le même procédé pour son 7ème long-métrage.

Le film “La voix de Hind Rajab” se présente ainsi comme un mélange de documentaire et de fiction, utilisant des faits et des témoignages réels tout en bordant autour des éléments de fiction. Dans cette production, la tunisienne a inséré des extraits des enregistrements téléphoniques réels du croissant rouge palestinien et de la fillette de 6 ans.

Filmé à huis clos à Tunis, le long-métrage se caractérise par une atmosphère bouleversante et immersive. Evitant de présenter frontalement des scènes de violence et de guerre et en se basant uniquement sur les échanges dans les locaux de l’organisation humanitaire, le film laisse au spectateur la liberté d’imaginer les faits et le chaos, les images des chars israéliens tirant sur une  voiture sans défense, en jouant sur l’angoisse provoquée par les appels de détresse.

Le long-métrage met également en évidence le parcours du combattant que vit chaque jour, les aidants du Croissant-Rouge pour arriver à circuler dans les rues bombardées de Gaza et de Palestine et la complexité des procédures administratives pour qu’une ambulance puisse suivre un itinéraire précis et arriver à sauver des vies, à ses risques et périls.

La caméra portée à l’épaule et les gros plans sur les acteurs accentuent l’ambiance d’étouffement et d’angoisse  dans ce film fait en urgence, marqué par des lourdeurs et des dialogues superflus. Néanmoins, il a le mérite de mettre le spectateur face à son incapacité d’agir et questionne sur notre impuissance collective…

On s’accroche à cette voix qui semble résumer tout un conflit, un appel interminable que nous entendrons de l’autre rive peut être une seule fois,  mais qui résonne encore et encore. Le film a le mérite de s’adresser à une cible qui ne s’intéresse pas forcément aux documentaires et joue de cette oscillation entre la réalité et la fiction pour passer les appels au secours de Gaza, de la Palestine…

The Voice of Hind Rajab bénéficie du soutien des grands protagonistes d’Hollywood à l’instar de Brad Pitt, Joaquin Phoenix, Rooney Mara et les réalisateurs Alfonso Cuaron, Jonathan Glazer comme producteurs exécutifs.

Présenté en avant-première au Festival international du film de Venise, il a remporté le Lion d’argent à la Mostra de Venise 2025 et a été choisi pour représenter la Tunisie dans la catégorie du meilleur film international aux Oscars 2026.

Sara Tanit

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