Imagine Que Ton Ame Ecoute de Karim Thlibi : un spectacle engagé qui rappelle que la musique est universelle

Imagine Que Ton Ame Ecoute de Karim Thlibi : un spectacle engagé qui rappelle que la musique est universelle

S’il y a un attribut que l’on peut donner à la musique c’est bien son universalité. Sa capacité à toucher tout le monde et réveiller un panel d’émotions indescriptibles. La musique parle toutes les langues et possède le pouvoir d’habiller facilement toutes les joies, tous les désarrois, tous les doutes, toutes les peines.

C’est précisément cette puissance que Imagine Que Ton Ame Ecoute, le nouveau spectacle de Karim Thlibi spécial Festival Carthage 2025, célèbre. Une véritable invitation à se perdre et s’envoler là où le musique peut t’emporter. Un appel à vivre ce que des notes nerveuses, nostalgiques, nonchalantes, bohèmes ou énergiques peuvent réveiller en toi.

La musique proposée dans ce spectacle possède la particularité d’être personnelle; elle parle seulement à celui qui l’écoute. Difficile de trouver deux interprétations identiques d’une même sensation musicale.

Sous la houlette du maestro Mohamed Bouslama, l’Orchestre Symphonique Tunisien et le Chœur du Théâtre de l’Opéra de Tunis ont donné toute leur puissance à cette fresque musicale. Ils étaient rejoints par un panel de solistes et musiciens d’exception : le violoniste virtuose Zied Zouari, le joueur de gasba Hssin Ben Miloud, le guitariste Hedi Fahem, le percussionniste Hamdi Jammoussi et plein d’autres.

Etaient présents des chanteurs aux voix remarquables comme Mohamed Ali Chebil, la Palestinienne Nai Barghouti, Saber Radouani, Najwa Amor, Sirine Harabi, Nasreddine Chably et le bariton Bahaeddine Ben Fadhel.

Tous ensemble, ils ont traduit en musique de véritables tableaux de vie, chacun décrivant une condition humaine, un état d’esprit, une aspiration, un souvenir ou un moment particulier. Brièvement introduits par l’acteur Mohamed Mrad, à travers des phrases qu’on aurait aimé pouvoir lire sur l’écran, et comprendre pour mieux suivre l’enchainement de la soirée…

Les différents chapitres du spectacle furent agrémentés de danses aériennes interprétées par des chorégraphes qui s’accrochent à leurs rubans et s’adonnent à des prestations artistiques impressionnantes emmenant le public à interpréter librement les mouvements. On pouvait deviner des scènes de fuite, de recherche en passant par l’envol, jusqu’à l’éclosion.

Ce qui perturbe dans le spectacle Imagine c’est aussi le langage utilisé par les choristes et les chanteurs. Du latin, à ce qui s’assimile à du langage bédouin en passant par des vocalises puissants, et des performances vocales uniques, ce n’est qu’à la fin qu’on chante en arabe, en hommage à la Palestine.

En effet, cette nouvelle version du spectacle Imagine, concoctée spécialement pour Carthage, s’inspire toujours de l’œuvre de Mohsen Ben Nafissa Ghadan yawm al kiyama (Demain… Jour de la Résurrection), avec des éléments clés qui y sont toujours représentés, néanmoins des idées ont été privilégiées pour coïncider avec le thème du festival international de Carthage qui met à l’honneur la cause palestinienne.

Ainsi on a pu déceler dans les chapitres exposés les thèmes de l’exil, de la séparation, de la recherche de soi, d’un endroit où s’abriter, d’une escale, d’un nouveau monde, la fuite en avant…

On a pu deviner à travers des images floutées, qu’on abordait les histoires des immigrés qui se jetaient à l’eau en quête d’un avenir meilleur. Des histoires de femmes paysannes qui luttent quotidiennement dans des conditions infâmes.

Le clou du spectacle fut le passage dédié à la Palestine et à Gaza. Sur l’écran géant, on a vu franchement des immeubles qui s’effondraient, des enfants en souffrance, les malheurs du peuple opprimé, avant d’afficher en grand le drapeau palestinien.

Les chansons ne donnaient plus aucune liberté à l’interprétation. On entonnait par cœur  ‘Yamma mwili el hawa’, ‘3ala dal3ouna’, ‘Cheddou ba3adhkom’ ou encore ‘Zeman’… la voix palestinienne retentit haut et fort pour mettre en avant les douleurs et les luttes qui nous parlent et nous obsèdent.

Avec Imagine Karim Thlibi nous a emmené dans des mondes parallèles où les rêves et les cauchemars cohabitent avant de nous faire revenir sur terre et nous bouleverser avec ces images, ces plaintes, craintes et appels du peuple palestinien frère.

Plus qu’un spectacle, c’est une expérience immersive, une œuvre qui hantera pendant un bon moment, quiconque possédant encore une once d’humanité, rappelant que l’art peut être une arme de mémoire et de conscience.

Sara Tanit

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