Mourad Matahri, l’organisation avant tout

 

Jazz à Carthage by Tunisiana, rendez-vous musical incontournable en Tunisie, aura lieu du 5 au 15 avril courant. Rencontre avec Mourad Matahri, directeur de Scoop organisation et producteur du festival.

mourad-mathari-040412Son bureau est minutieusement rangé. Au mur, des photos de Mourad Matahri avec Sting ou encore Lara Fabian, une affiche de Michael Jackson. Des flyers du festival Jazz à Carthage by Tunisiana sont disposés à l’entrée dans un désordre organisé. Prévoir, planifier, entrer en contact avec les artistes, est le dada de Mourad Matarhi dont le carnet d’adresse après plus de 20 ans dans l’évènementiel commence à être bien fourni. Chaque année, c’est la même rengaine. Convaincre les artistes mais aussi avoir à faire à la lenteur de l’administration tunisienne qui pèse sur les initiatives privées. «Le discours des années 1980 est toujours là, j’ai l’impression de combattre des moulins à vent», lâche-t-il dans un soupir. Fatigué, Mourad Matahri l’est. Découragé, pas encore. Trapu, les cheveux noir, il http://www.hightech.loc/plateforme/fckeditor/editor/images/spacer.gifest persuadé que les initiatives culturelles privées sont indispensables, « alors on se bât. L’Etat n’invitera pas des artistes comme Branford Marsalis », regrette cet homme d’une cinquantaine d’années, fustigeant « une culture sous tutelle ».

Le directeur de Scoop Organisation, qui opère depuis plus de 20 ans dans l’organisation d’événements culturels et co-produit notamment Musiqât, voudrait organiser plus d’un festival par an. Et c’est avec un certain regret qu’il évoque d’ailleurs celui de Tabarka, qu’il a quitté en 2003. «Il y avait une ambiance particulière à Tabarka. Il y avait des concerts de rues. Les gens en profitaient et allaient aussi à la plage avant d’assister le soir à des concerts dans une ambiance assez détendue. Cela a créé toute une génération de musiciens. Les écoles de musique se sont multipliées ensuite ».

« C’était James Brown quand même »

Pas d’études de musicologie pour Mourad Matahri, mais son enfance a été rythmée par les Beatles, Bob Dylan, Santana ou encore James Brown. Ce dernier qu’il a rencontré et invité au festival de Jazz à Carthage en 2008. «On m’avait prévenu des caprices qu’il pouvait avoir. Des caprices de dernières minutes. Il demandait aussi bien des huîtres ou un vinaigre particulier. Et quand on disait qu’il n’y en avait pas, il rétorquait : « mais si, j’ai vu des gens en avoir à l’hôtel». Alors on allait chercher tout ce qu’il voulait… c’était James Brown quand même », rigole-t-il tendrement, se remémorant aussi le concert de Sting : « réussir un concert comme celui de Sting et recevoir les félicitations de l’artiste…» Mourad Mathari laisse sa phrase en suspens, un sourire aux lèvres laissant transparaître une certaine fierté. Cette fierté ne le lâche pas lorsqu’il évoque les Nuits du Millénaire : «On avait organisé des tournées à l’Européenne. Chaque soir une nouvelle ville, on montait et démontait la scène et le son. Ce sont des choses qui n’ont plus lieu, ou de moins qui ne sont pas organisées de la même manière».

« On a tout à y gagner »

«Cette année, la principale difficulté a été de remettre la machine en marche», explique-t-il. Après une année d’absence à la suite de la révolution tunisienne, le festival Jazz à Carthage by Tunisiana revient en force. Pas de coup de cœur particulier pour cette édition 2012, il cite Otis Taylor, Earth, Wind & Fire ou encore Hindi Zahra. « Mais les efforts que j’ai dû faire pour avoir Branford Marsallis sont considérables. Et c’est l’artiste 100% jazz de la sélection », note-t-il. Depuis quelques années, il est reproché au festival de Jazz à Carthage by Tunisiana de s’ouvrir à d’autres artistes. Une critique qu’il entend et comprend, « mais quand on ne reçoit pas de financement du ministère de la Culture et qu’on a un budget de 500.000 dinars, alors que le festival Mawazine au Maroc en a un de 20 millions d’euros, quand on vend 10 places à 160 dinars, alors que ce serait le prix pour assister à un ou deux concerts en Europe, on doit s’ouvrir pour attirer les jeunes mais aussi fédérer un certain public », argumente ce père de trois enfants qui vient de démissionner du syndicat tunisien libre des organisateurs et producteurs de spectacles. A ses yeux, les contraintes se multiplient : les charges sont élevées, les salles rares, les billets peu chers. « J’aurai voulu envoyer un programme du festival à l’ONTT pour qu’il soit transmis aux agences de voyages, aux tours opérateurs, aux hôtels… le ministère du Tourisme a pris conscience de l’importance de l’évènementiel. Ensemble, on a tout à y gagner ».

 

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