Pourquoi nos (futurs) informaticiens sont déjà fatigués ?

Le Job Salon 2009 a ouvert ses portes, le mardi 24 février. Et après avoir consacré une journée aux téléacteurs, le 25 février devait être dédié aux candidats des secteurs High Tech, comme l’informatique, les télécoms, et le multimédia. Un événement qui a eu lieu à l’Exposium, à El Menzah9, pour mettre en contact les entreprises avec les demandeurs d’emploi.

Le salon devait ouvrir ses portes à 10h. Mais pour ne pas faillir à nos bonnes vieilles traditions, un (petit) retard de 15 minutes a été dument respecté avant de faire entrer les candidats.  Une bonne centaine de jeunes gens ont patienté, dehors, par ce « beau » temps d’hiver.  A noter que l’édifice est en fait une villa aménagée en trois étages non cloisonnés. Pas nécessairement la solution la plus adaptée pour d’aussi importants événements. Mais ce qui nous a le plus marqué, ce ne sont pas ces considérations architecturales, mais plutôt le regard des jeunes gens. Un regard désabusé, fatigué.

Une  impression personnelle purement subjective ? Soit. Toujours est-il que les uns et les autres répercutaient le même son de cloche. La même histoire reprise quasi unanimement : « je cherche un emploi dans mon domaine. Et à chaque fois, les employeurs exigent une expérience professionnelle.  Or comment je peux l’avoir si on m’impose cette condition au préalable et que mon cv est systématiquement rejeté » ?  Certains ont même avoué chercher un emploi depuis plus de deux ans. Ali, par exemple, nous a confié, avec un petit sourire amer : « je suis venu juste pour voir. Pour pouvoir me dire que j’ai fait ce que je devais faire ».  Histoire de ne plus culpabiliser, faute de n’avoir pas fourni assez d’efforts, pour dénicher du boulot.

Quant aux organisateurs, ils peuvent se féliciter du succès du salon, vu l’afflux incessant des candidats et le nombre de  CV déposés. De plus, parmi les sponsors et autres exposants, deux grands clients se sont taillé la part du lion en se partageant la moitié du rez-de-chaussée : Tunisie Telecom et Tunisiana. Le stand de recrutement de notre opérateur historique, croulait sous les dossiers déposés. Les CV tombaient par centaines de toute part. Mais une responsable a bien voulu nous éclairer. Sur les critères de bases de recrutement, sa réponse est claire :

 « Ca dépend du poste. Aujourd’hui nous recrutons des ingénieurs informaticiens donc nous nous basons sur le cursus universitaire. Mais hier par exemple, nous avons recueillis les dossiers pour la hotline de Tunisie Télécom. Et dans ce cas, nous nous sommes basés sur la façon de parler de la personne, son sens de l’écoute, son élocution et son niveau de français ». Les hotliners sans diplômes ? « Ils sont invités à voir du côtés des sociétés off shore ». Soit à l’autre étage. Car à « Tunisie Télécom, nous leur offrons d’abord des contrats SIVP ». Le stand de Tunisiana, assailli de toute part par les visiteurs n’a pas été plus facile à approcher.

Côté exposants, ce qui peut paraître surprenant, c’est le fossé apparent entre la masse de gens et les sociétés. Un écart qui se fait d’autant plus sentir que les entreprises présentes ne sont pas toutes aussi sollicitées. En effet, la majorité absolue des demandeurs d’emploi se sont agglutiné devant les stands de Tunisiana et Tunisie Telecom pour déposer leurs CV.

 Sinon, la deuxième part du gâteau est revenue aux sociétés offshores. Celles-ci  ont été essentiellement disposées au premier étage. Et la surprise est venue des centres d’appel, très présents dans cette deuxième journée, sachant que la première leur était réservée, alors que la deuxième devait en principe être consacrée aux candidats dans les domaines de l’informatique, du multimédia et autres télécommunications. Or les visiteurs, qui ont théoriquement réellement besoin de travailler, boudaient lesdits call-centers. L’un des acteurs les plus connus du secteur des centres d’appels a ainsi été littéralement snobé par les candidats au boulot. Tout au long de deux heures de notre « butinage » entre les stands, il avait beaucoup de peine à capter l’attention des demandeurs d’emploi. Pourtant à quelques pas, son principal rival voyait les candidats se bousculer à son portillon. Allez savoir pourquoi ! Les superviseurs des stands de ces call-center nous ont accueillis de prime abord avec un large sourire. Et pour cause ! Nous avons parlé directement en français, et avec une pointe d’accent parisien, s’il vous plait, histoire de susciter l’intérêt de notre interlocuteur ! Mais quand ils nous ont demandé un CV et qu’on leur a répondu que nous étions des journalistes… le sourire a viré au jaune, et le ton adopté a frôlé les limites de l’arrogance. Nos questions ont été esquivées. Force est de constater que nos centres d’appels, qui multiplient pourtant les offres d’emploi dans la presse nationale, ont peur des journalistes ! 

 Au fil des minutes, le nombre des visiteurs augmentait. Au point que le Directeur Général de l’Exposium, M. Zied Baccour a invité (certes gentiment, mais non sans une pointe d’agacement) ceux qui ont réussi à déposer leur CV de quitter le salon, pour céder la place aux nouveaux visiteurs. A croire que les places sont aussi chères, dans le monde du travail, comme dans l’espace réduit de la villa.

Welid Naffati

Print Friendly, PDF & Email

Plus :  Actu



  • Envoyer