Tunisie : L’Aïd, entre calculs et calendriers

Pourquoi se baser sur les mois lunaires, alors que tous les autres peuples de la planète ont adopté le calendrier grégorien, 100% solaire, sans surprise ni décalage saisonnier?

L’Aïd de cette année 1430 ne fera pas exception à la «règle». Les uns et les autres se perdent en conjectures quand il s’agit de déterminer le dernier jour de Ramadan.  Parce que le début, comme la fin du mois sacré sont marqués par l’apparition du nouveau croissant de lune qui marquera le premier jour de mois suivant, c’est à dire Chawwal.

L’institut météorologique tunisien a déjà fait ses calculs et prévoit la possible apparition du nouveau croissant de lune du mois de Chawwal pour la soirée du samedi 29 Ramadan. Et ce, juste après le coucher du soleil pendant 4 minutes au nord de la Tunisie à 8 minutes au sud. Cette éventuelle visibilité du croissant entraînerait donc l’annonce officielle de l’Aïd pour le lendemain du 29ième jour de Ramadan, soit le dimanche 20 septembre prochain. D’autres ne perdent pourtant pas l’espoir de fêter l’Aïd le lundi, pour des raisons plutôt profanes : il s’agit de bénéficier d’une journée supplémentaire de congé. Mais pour une question de visibilité, justement, le suspense se maintiendra jusqu’à la nuit du doute de ce samedi 29 Ramadan. Parce que le calendrier musulman n’est pas précisément fixé d’avance. Mais il n’en a pas toujours été ainsi.

Calendrier Fatimide ?

La dynastie Fatimide originaire de Tunisie, basée au départ à Mahdia, avant de partir à la conquête de l’Egypte et fonder au passage le Caire, et la prestigieuse Mosquée d’Al Azhar a aussi créé son calendrier. Le concept aurait même été lancé par le controversé calife fatimide Al Hakim et basé sur les travaux de l’astronome et mathématicien arabe du Xème siècle, Al Battani. Et son modèle est fondé sur les calculs mathématiques déterminant la visibilité lunaire. Un calendrier qui laisse peu de place à l’incertitude, puisque les mouvements de l’astre de la nuit, symbolisant le Ramadan seraient ainsi parfaitement prévisibles. Les Iraniens, chiites comme l’étaient nos Fatimides se basent d’ailleurs jusqu’à ce jour sur le calcul astronomique et nom sur la visibilité du croissant pour célébrer Aïd el Fitr. Mais… pourquoi donc se baser sur les mois lunaires, alors que tous les autres peuples de la planète ont adopté le calendrier grégorien, 100% solaire et surtout sans surprise ni décalage saisonnier?

Calendrier lunaire universel

L’Islam est une religion à vocation universelle. A ce titre, elle est destinée à être vécue, et célébrée, aux quatre coins de la planète. Imaginons un seul instant que le mois de Ramadan soit solaire. Disons qu’il correspondrait par exemple dans le calendrier grégorien actuellement en usage au mois de décembre, histoire de faciliter les choses, et raccourcir les journées de jeûne ! La solution ne tiendra pas, parce qu’elle ne sera tout simplement pas équitable ! Parce que si les plus courtes journées de l’année tombent bien en décembre pour l’hémisphère nord, en ce même mois, c’est l’été pour les Australiens, les Sud-Africains, et autres Argentins. Dans l’hémisphère sud, c’est bien en décembre que les jours sont les plus longs. Si les mois musulmans se basaient sur un calendrier solaire, ce ne serait donc guère équitable. Puisque quand les uns bénéficieront systématiquement d’un mois de jeûne facile, les autres seront condamnés à des journées sans fin, sous le dur soleil de l’été, et ce, pour l’éternité. Le décalage annuel d’une dizaine de jour du Ramadan par rapport au calendrier «administratif», permet donc de déplacer périodiquement le mois sacré sur les quatre saisons de l’année, et ce, indépendamment du lieu où l’on se trouve sur la Terre.

A cet égard, il apparaît donc que le calendrier lunaire, au-delà de sa versatilité, a aussi ses avantages. Et que l’on fête la fin du mois de Ramadan dimanche ou lundi, toute l’équipe de Tekiano souhaite à ses lecteurs, Aïdkom Mabrouk.

Malek Ben Hammadi

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