Tunisie 2029 : Vue américaine à basse résolution

Que sera la Tunisie dans 20 ans ? Une question à laquelle 18 jeunes réalisateurs ont essayé de répondre à travers leurs films. En Digital, VHS ou grâce à leur téléphone portable. Reste à bâtir, en Tunisie, le statut de la liberté… digitale.

Digital, VHS ou téléphone portable, peu importe le support pour se présenter au concours de création audiovisuelle de «Views of America». Au-delà de la manifestation cinématographique, les Rencontres du Cinéma Indépendant Américain de Tunis se veulent une occasion pour promouvoir des cinéastes tunisiens en herbe. Dans une soirée à l’hôtel Ramada Plaza à Gammarth, Hisham Ben Khamsa, organisateur de la manifestation, a décerné les prix et les récompenses à huit jeunes réalisateurs, vendredi 20 novembre. C’était en présence des différents partenaires dont l’ambassade des Etats Unis d’Amérique en Tunisie, représentée par l’ambassadeur lui-même, et la directrice de la société de production Digipro. Entre jazz et funk en live joué par les «So Soulful» et un mix assuré par Dj Danjer, cette cérémonie s’est voulue éclectique.

L’art privilégié sur la technique

«Le jury du concours attribue beaucoup plus d’importance à la valeur  artistique qu’à l’approche technique lors de l’évaluation des films présentés» affirme Hisham Ben Khamsa, organisateur de la manifestation. «C’est normal vu que les moyens mis à disposition des jeunes réalisateurs ne sont pas les mêmes. Il y a les étudiants d’écoles qui disposent d’un matériel professionnel alors que d’autres filment avec les caméras de leurs téléphones portables» persiste le réalisateur et universitaire tunisien Mohamed Damak, président du jury de ce concours. D’ailleurs, les lauréats semblent apprécier ce choix du jury. «Ce qui m’a touché le plus est la reconnaissance de l’autre. Les films ne sont pas évalués en fonction des moyens techniques. C’est l’idée qui importe le plus. Par exemple, mon film a été tourné, à la maison, avec une caméra Mini DV à basse résolution. Je l’ai filmé à la maison avec les lumières normales» nous confie Ghassen Khemakhem, lauréat du 1er prix du concours en 2008 avec son film «Moi et moi-même». Même Mohamed Oussaifi, lauréat du 1er prix en 2009 est séduit par l’approche. «J’ai filmé avec un caméscope Sony Mini DV. Ce n’est pas vraiment pro mais ça a fait l’affaire» dixit Mohamed en alternant : «Je me suis lancé sans hésitation. Cette expérience m’a permis encore plus de familiarisation avec le matériel et avec l’ambiance du tournage».

Rendez vous avec l’oncle Sam

Cap sur New York dès le 18 décembre pour un voyage tous frais payés au profit des trois premiers lauréats du concours. «C’est très intéressant. Après tout, les films qui ont marqués mon enfance, et celle de ma génération aussi, sont les films américains. Quand on était petit, on partait chercher des «Van Damme» et autres dans les clubs vidéos. C’est très importants pour nous de voir en réalité les décors et les lieux de tournages de ces films» nous confie Mohamed Oussaifi, étudiant à l’Ecole Supérieur de l’Audiovisuel et du Cinéma. Il est le lauréat du premier prix de ce concours ayant comme thème « Tunisie 2029, votre vision de la Tunisie dans 20 ans». Mohamed Oussaifi a réalisé un film intitulé «Contrastes». « J’ai présenté ma vision de la Tunisie en 2009 à travers plusieurs contrastes. Partager ma vision, celle d’un jeune, avec d’autres dont des gens, probablement plus âgés, est très intéressant pour moi. La notion du partage est ce qui m’a tenté le plus dans la thématique du concours» explique-t-il.

Mais d’autres réalisateurs en herbe ont déjà vécu l’expérience lors de la première édition de ce concours. Ghassen Khemakhem a eu le premier prix lors de l’édition de 2008. Il nous a parlé de son voyage à New York : «Le voyage était une découverte d’un autre monde, une autre dimension et une autre mentalité. On a fait des visites à l’école de cinéma de New York et on est parti voir plusieurs expositions d’art contemporain et musées. Pour moi, le coup de cœur reste la découverte de certaines œuvres d’Andy Warhol. Son travail de l’art vidéo est tout simplement bouleversant. On a également rencontré des réalisateurs américains qui ne connaissent même pas la Tunisie. Quand on leur dit que c’est en Afrique du Nord, ils se sont interrogés sur le fait qu’on ne soit pas black» !

Que sera la Tunisie dans 20 ans ? Une question à laquelle les 18 jeunes réalisateurs participants à ce concours ont essayé de répondre à travers leurs films. Confiants en la magie du cinéma, pensons à une Tunisie dont le peuple est reconnu partout dans le monde grâce aux objectifs des caméras de ses réalisateurs. Mais pour réaliser ce rêve, encore faudrait-il bâtir le statut de la liberté… digitale.

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