Tunisie : Recrutement de muezzin par sms !

La Suisse a des problèmes avec les minarets ? Houma FM, elle, en a avec son muezzin. La radio organise même un casting pour choisir son nouveau muezzin. Les auditeurs l’éliront par SMS. C’est l’appel du film S.O.S Muezzin !

S.O.S Muezzin a été projeté en avant première, jeudi 24 décembre, lors de «Tunis Tous Courts». C’est un court-métrage réalisé par Mamdouh Ben Abdelghaffar en 2009. Il s’agit de la première œuvre sur grand écran d’un cinéaste issu du monde de la pub. Les événements du film se déroulent dans «HOUMA.FM», une radio privée, qui fait recours au SMS, pour faire participer ses auditeurs. Et voici qu’un casting est organisé par pour recruter un nouveau muezzin pour la mosquée du quartier.


Le mélange incolore

Dans S.O.S Muezzin, des candidats de divers profils se présentent pour le casting de la nouvelle recrue de «HOUMA.FM». Devant un micro-studio, les candidats montrent leurs talents et essayent de gagner le concours. Les auditeurs devront élire le meilleur candidat en votant par SMS, évidemment. Mzeoudi, croquemort, homosexuel, tout le monde s’y intéresse. «On a un problème avec l’Adhan. Pour l’appel à la prière, on utilise soit la radio ou on choisi les mauvaises personnes. J’ai vérifié les critères de qualification d’un muezzin et il s’avère qu’un muezzin est payé 158 dinars par mois. Avec un tel salaire, ce n’est pas du tout évident de trouver quelqu’un de qualifié» affirme Mamdouh Ben Abdelghaffar. D’ailleurs dans le film, on entend même l’appel à la prière d’un cheikh non admis par ce que son Adhan n’est pas tunisien. Mamdouh poursuit : «Le film ne parle de l’islam. Il s’agit plutôt de couleur. D’ailleurs, j’ai pensé à l’intituler «Incolore» à moment donné». Ainsi varient les couleurs à travers les personnages du film.

Les SMS prennent le pouvoir !

Vêtu en red, gold & green à la manière rasta, l’animateur présente son émission en annonçant l’objet du casting. Dans son studio, le paradoxe saute aux yeux. C’est un fan de Bob Marley et de culture rasta impliqué dans une démarche typiquement commerciale. Porteur d’un discours démagogique, il travaille pour une radio à orientation manipulatrice. Et quand on sait que la culture rasta avec son ultime ambassadeur Bob Marley est un symbole de militantisme contre la manipulation, l’hypocrisie, l’injustice et la démagogie…le paradoxe s’affiche clairement !

Partageant cette interprétation avec le réalisateur de ce court métrage, il nous confie : «C’est vrai ! Qu’est ce qu’il a à avoir là dedans. Malgré son allure, ses intérêts et malgré que le studio est personnalisé selon son univers musical, il est là inscrit dans ce système». Ce jeune réalisateur nous affirmerait même qu’il s’identifie à ce personnage interprété par Moez Gdiri (Zak dans Njoum Ellil, pour les fans de séries télé).

Derrière le micro du casting, un ex-taulard fraîchement sorti de prison se présente. Il a même profité de l’occasion pour balancer «une dédicace» à ses amis qui sont encore au «trou». Un autre personnage dans le genre «porteur de couffin» en profite pour remercier tous les responsables de la région. Alors qu’un beau gosse débarque directement dans le bureau du directeur de «HOUMA.FM». Un repos samedi soir et une dispense de la présence pour l’appel à la prière de l’aube sont exigés. On en voit de toutes les couleurs !

A travers cette comédie décapante, Mamdouh Ben Abdelghaffar tourne en parodie les médias qui partent loin avec «l’interactivité». Une main mise qui prend de plus en plus du pouvoir sur nos consciences.

«Le destin de l’individu est désormais lié à la volonté des médias. Ca ne m’étonnerait pas qu’un jour, les élections présidentielles se fassent par SMS. Les opérateurs téléphoniques seront les plus grands gagnants. Ils auront un pouvoir énorme» conclut le réalisateur. Et gare à la colère de l’opérateur !

Thameur Mekki

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