Tunisie : Super Mario plombé à Carthage

Super Mario est de retour. Mais ce n’est ni sur Wii, ni sur GameCube. Pas sur la PlayStation 3 ou sur ordinateur non plus. Le cultissime personnage de Nintendo a fait cette fois-ci son come-back sur la scène du théâtre de Mad’Art Carthage, mercredi 03 mars 2010.

C’est Rinda Dabbagh, danseuse et comédienne tunisienne, qui l’a réincarné dans «Miroir dis-moi», spectacle produit par «Théâtre Phou». Après avoir été adapté pour la télé et le cinéma, Super Mario, personnage phare de jeux vidéo inspire cette chorégraphe tunisienne. Voici que le plombier d’origine italienne s’évade des écrans des jeux vidéo, ceux de la télé et du cinéma. Sur scène, l’univers de Super Mario prend une nouvelle déclinaison. Il est à l’honneur dans les premières Journées de la Danse Contemporaine, «Danser à Tunis».

Le Papa absent. Place au moustachu !

«Dad, dad…There is a man in the garden !» crie Rinda Dabbagh. Vêtue en jupe courte, chemise blanche et cravate, l’artiste a fait son entrée sur la scène du Mad’Art vers 19h45. Sa tenue et son discours font allusion à une petite écolière. Apeurée, elle appelle son papa sans cesse. Aucune réponse en feedback à son appel. Soudain, la scène sombre dans l’obscurité, un long cri de détresse disperse le noir et la lumière nous révèle de nouveau la scène. Simultanément, la musique originale de Super Mario se lance. Rinda passe de l’angoisse à la confusion. Elle tâtonne ses premiers pas de danse. Dans tous les sens, ses pas cherchent à suivre le rythme de la musique originale du jeu légendaire de Nintendo. Comme si cette danseuse voulait se rafraichir la mémoire.

A l’écoute de cette musique, on dirait que la femme a voyagé dans le temps sans pouvoir dépoussiérer les vieux chapitres. Ce reload du passé ne tarde pas à être fructueux. Voici que la danseuse se lâche au rythme. On ne saurait s’il s’agissait de mouvements se référant au popping (smurf) dans une optique expérimentale ou si cette artiste a, tout simplement, du mal à interpréter les mouvements basiques de cette danse.

«Cette pièce chorégraphique est mon jeu d’enfance, Mario. Les obstacles me renvoient à mes gestuelles et mes exercices. Les bonus sont les modèles que j’ai croisés dans mon parcours. Ils alimentent mon énergie ou la réduisent» ainsi présente la chorégraphe, Rinda Dabbagh, son spectacle, «Miroir dis-moi».

Bonus : Michael Jackson et Pina Baush

Trésor, escabeau à cordes, quelques pas d’escaliers par-ci, quelques-uns par là, les accessoires éparpillés partout sur la scène nous renvoient clairement à l’univers graphique du jeu de plateforme de Nintendo. Se glissant dans la peau de Mario, Rinda Dabbagh commencent à se confronter aux obstacles. Et elle ne tarde pas à gagner son premier bonus : Le clip vidéo du morceau Thriller du king of pop, Michael Jackson. Après avoir changé de costume, la danseuse tunisienne se dresse éblouie face à la vidéo mettant en scène une chorégraphie de l’un des meilleurs danseurs de tous les temps. S’appropriant le look d’MJ, elle essaye de suivre ses pas et de les imiter. Mais…en vain. «Oh, si je pourrais danser comme Michael le fait !» dixit Rinda avec peine.

Tournée face au miroir, elle commence à se poser des questions. A travers le come-back de Mario, l’artiste se confie sur scène et remet en question différentes étapes de son parcours initiatique. «My dream is to fly over the rainbow so high» le tube de musique house, teinté des sonorités du jeu Super Mario, résonne dans la salle. Débordante de punch et d’énergie, la chorégraphe-comédienne commence à escalader l’escabeau à cordes.

Dans ce périple en traversée des étapes écoulées de sa vie, cette femme croise Pina Baush, ressuscitée en vidéo dans «Miroir dis-moi». Rinda Dabbagh s’étale dans cet hommage, abandonne les autres costumes et se glisse dans une robe rouge telle que celle portée par Pina Baush, la défunte figure phare de la danse contemporaine. Sur du metal rock ou de la musique symphonique, Rinda exprime son malaise et ses déceptions, ses gloires et ses consécrations.

Si le miroir était sincère…

Le spectacle prend fin avec une vidéo, en dessin animé, de Super Mario battant son ennemi ultime, Bowser. Mais après l’avoir remercié, la princesse Peach se montre ingrate. Surprise ! Contrairement à la tradition, elle refuse catégoriquement d’embrasser son sauveur. Mario la laisse tomber. Le sort de Princess Peach ? Bowser revient et lui dévore la tête !

Joli concept et belle écriture, mais la référence à Super Mario ne suffit pas à pallier la disgrâce des mouvements de danse. Un aspect pourtant fondamental dans un spectacle chorégraphique. Les multiples costumes, accessoires et vidéos ne sauraient à eux seuls communiquer au public ce que le corps n’est pas capable de faire. «Miroir, miroir en bois d’ébène, dis-moi, dis-moi que je suis la plus belle» proclament les femmes des vieux contes de fées. Et si notre chorégraphe et danseuse Rinda Dabbagh posait la question au miroir après son spectacle ? La réponse ? Elle ne saurait être flatteuse. A moins que le miroir lui-même ne joue la comédie.

Thameur Mekki

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