Piratage en Tunisie : Bon pour Windows, mauvais pour l’Open source ?

Pour sauver les logiciels libres, les SSII demandent au ministère des TIC de combattre le piratage. Les stats d’utilisation de l’Open source dans notre pays sont en effet peu satisfaisantes malgré les efforts entrepris depuis près de dix ans. Un récent rapport dresse un état des lieux alarmant pour la survie du “Gnu” en Tunisie.

On a beau avoir depuis 2003 une unité dédiée à l’Open source rattachée au ministère des Technologies de la Communication, un secrétariat d’Etat chargé de l’Informatique, de l’Internet et des Logiciels libres ou encore portail dédié au Gnu (mascotte de l’esprit du Libre dans le monde informatique), l’Open source peine toujours à décoller en Tunisie.

C’est le résultat d’un rapport faisant un état des lieux de l’utilisation et du développement des Logiciels libres en Tunisie. Ce rapport, publié sur Internet par un groupe de défenseurs des Logiciels libres, a été travaillé conjointement par l’Institut de Sondage et de Traitement de l’Information Statistique (ISTIS) et la société d’ingénierie informatique MedSoft pour le compte du ministère des Technologies de la Communication.

Dans sa conclusion, le rapport dresse un bilan plutôt négatif de la pérennité de l’Open source en Tunisie : «La principale constatation qui se dégage de ce sondage est la confusion qui règne dans les esprits des utilisateurs et développeurs sur la notion du Libre. (…) Cet indicateur résume la réalité de la situation et renvoie à l’ampleur du travail qui reste à accomplir dans le cadre de la mise en place d’une stratégie de développement de l’utilisation du Logiciel libre Principalement, il met en évidence une faiblesse structurelle sur le terrain».

Open source : Persona non grata

Et les chiffres mis en exergue dans ce rapport sont plutôt alarmants concernant l’utilisation et la connaissance des Logiciels libres dans les différentes structures économiques du pays. Si les associations, écoles, universités et sociétés privées boudent délibérément le Gnu pour différentes raisons, les Société de Service en Ingénierie Informatique (SSII), par contre, ne montrent guère d’engouement pour le Libre malgré leur statut “d’ambassadeurs de l’Open source”.

Pire encore, 87,4% des postes de travail de ces SSII tournent sous Windows, le système d’exploitation propriétaire de Microsoft. Cet OS est également prédominant dans l’utilisation de leurs serveurs : 60,8% d’après le rapport.

Pourtant, ce sont les SSII «qui sont supposées prendre en charge le développement du secteur [NDLR : des logiciels libres] au niveau économique par l’offre», épingle l’étude délivrée au ministère des technologies de la communication le mois dernier.

Malgré cela, les directeurs des SSII continuent à croire que les Logiciels libres connaîtront beaucoup de succès en Tunisie durant les trois prochaines années.

Le piratage n’encourage pas le Linux

Mais ils ne cachent pas leur réticence et scepticisme sur l’utilisation de l’Open source pour leur propre infrastructure ou pour le compte de leur client : «Le manque de représentant de l’éditeur, le risque d’incompatibilité avec les solutions existantes chez les SSII et leurs clients et le manque de support et d’assistance technique représentent les principaux facteurs les plus contraignants à l’utilisation des Logiciels libres selon les déclarations des SSII», rapportent les auteurs de cette étude.

Pour ces sociétés spécialisées dans les services informatiques, la prospérité de l’Open source en Tunisie «pourrait être entravée» par la copie illégales des logiciels propriétaires qui sont très demandés sur le marché. 72% des SSII ont en effet recours au piratage pour vendre leurs services avec des prix compétitifs.

En plus clair, plus il y a du piratage des logiciels payants, plus on cultive l’addiction du consommateur à ce produit. Au final, ces personnes préféreront donc la voie du piratage au lieu de découvrir les solutions gratuites de l’Open source et les multiples avantages qu’elles offrent.

Aide financière pour promouvoir l’Open source

Pour y remédier, les directeurs des SSII demandent au ministère des Technologies de la Communication 18 actions de “sauvetage”. On en citera par exemple la protection des logiciels propriétaires, l’octroi d’avantages fiscaux pour les SSII opérant dans le domaine du Libre, l’assistance et l’aide financière pour les entreprises tunisiennes pour la migration de leurs applications existantes aux solutions Open source, ainsi que l’adoption progressive des logiciels libres au sein du secteur public.

Rappelons que le ministère des TIC a annoncé cette semaine un nouveau concours national qui se tiendra le 15 décembre prochain pour récompenser le meilleur projet à base d’Open source. Une action qui vise sans doute à promouvoir, même timidement, le Logiciel libre en Tunisie. Mais faut-il s’attendre qu’un tel concours puisse éradiquer le mal qui ronge le monde de l’Open source en Tunisie ?

Welid Naffati

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