Tunisie : Le dilemme médiatique de Ghannouchi

 

La crédibilité de la bande à Ghannouchi est en baisse. C’est sur le web que le gouvernement de transition est parti la reconquérir. Pourquoi opter pour un support alternatif sans réformer les médias dits classiques? Est-ce aussi une solution de transition ou un choix stratégique? Dilemmatique.

«Ghannouchi dégage» clament des centaines de manifestants sur la place du gouvernement d’El Kasbah ! Ils réclament la dissolution du gouvernement de transition et l’instauration d’une assemblée constitutive. La crédibilité de la bande à Ghannouchi est en baisse. Vite! Y a-t-il un remède? «Yes sir : le web» chuchotte un golden boy à son oreille. Farhat Rajhi, son ministre de l’intérieur, en sait quelque-chose. C’est sur le net que les efforts de cet ex-magistrat ont été récompensés. Le premier flic de Tunisie y a été affublé du titre de «Monsieur Propre» au moment où tout le monde est suspecté d’avoir les mains sales.

Et c’est donc parti pour une tentative de re-branding du commandant en chef du gouvernement de transition sur Facebook. Vendredi 18 février, une page dédiée au Premier Ministère a fait son apparition sur le réseau social. Mais ce n’est pas suffisant. Mohamed Ghannouchi est allé jusqu’à orchestrer un Vcast avec Emna Ben Jemaa, blogueuse et journaliste. Et la vidéo est mise en ligne sur Vimeo et Dailymotion suite à la création de deux channels respectifs pour le Premier Ministère. Voici que Ghannouchi marche sur les traces des cyber-activistes de Sayeb Salah et Nhar 3la Ammar et autres vidéo-blogueurs tunisiens. La vidéo a été visionnée environ 10 000 fois sur Vimeo et 5000 fois sur Dailymotion.

Un tel choix stratégique n’est pas anodin à une telle étape vu que si les manifestants d’El Kasbah se comptent par centaines, ceux du web se comptent par milliers. La page «Ghannouchi dégage» regroupe déjà vers les 8000 personnes sur Facebook. Elle a été créée juste après la fuite de Ben Ali et la proclamation de Ghannouchi président intérimaire de la Tunisie, soit vendredi 14 janvier. Mais l’actuel chef du gouvernement tunisien n’a pas que des détracteurs sur le réseau social. Ses sympathisants sont nettement plus nombreux. Leur nombre dépasse les 17 000 sympathisants dans une page lançant l’appel «Pour que Ghannouchi ne démissionne pas».

Il semble que le gouvernement est conscient qu’une interview télé ou radio est loin de représenter une issue de secours valable. Sans même parler de la presse papier qui traîne encore les casseroles argentées de Zaba. Et puis… A l’ère d’une Révolution qualifiée (à tort ou à raison) de 2.0, on ne saurait faire l’impasse sur les réseaux sociaux. D’autant plus que les journalistes qui ont mangé dans l’auge de Ben Ali trustent encore les créneaux du paysage audiovisuel.

Question crédibilité, ce n’est pas gagné, dans la mesure où les figures de proue de la désinformation n’ont pas été balayées. Dans l’attente d’une réconciliation des Tunisiens entre  leurs médias et leur gouvernement de transition, ne reste plus au gouvernement qu’à parier sur Facebook.

Thameur Mekki

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