Tunisie : Blogueurs face aux violences policières

Les blogueurs tunisiens ont été aux premières lignes durant la Révolution, et même après. Le rapport que vient de publier la fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) rappelle que les violences policières continuent de sévir après le 14 janvier. Et nos cyberactivistes n’ont pas été épargnés.

Le rapport de la fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) cite de nombreux témoignages de victimes des violences policières dans la Tunisie d’après le 14 janvier. Tekiano a choisi de publier ceux qui concernent particulièrement les blogueurs et les activistes qui résistent sur le Net.

Oussema Guaidi : la tête contre le mur
Oussema Guaidi, 24 ans, cyber-activiste, a participé le 24 avril à une manifestation avenue Habib Bourguiba, devant le ministère de l’Intérieur puis devant le théâtre municipal. De jeunes gens sont arrivés précipitamment et ont commencé à jeter des pierres en se livrant à des actes de provocation. Des policiers en civil cagoulés ont répondu en frappant les manifestants de manière indiscriminée avec des matraques, y compris des femmes et des enfants. Oussema était attablé à la terrasse d’un café situé sur l’avenue Habib Bourguiba, en compagnie d’amis, d’où il filmait les scènes de violence dont il était témoin. Un groupe de 6 ou 7 policiers s’est dirigé vers lui et l’un de ses amis, les ont attrapés et giflés puis conduits vers un fourgon de la Brigade de lutte anti-terroriste. Ils les ont assis dans le fourgon, ont allumé une lumière orangée et les ont frappés (coups de pieds, de poings et de matraque) avec une très grande violence. Puis ils les ont conduits à pied au poste de police de Bab Bahr où ils ont été remis à d’autres policiers.

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Environ 8 détenus étaient présents à ses côtés à Bab Bahr, tous ont été violemment frappés par une trentaine de policiers. Ils ont frappé la tête d’Oussema contre le mur à plusieurs reprises en le harcelant de questions et en l’insultant. Ils l’ont ensuite fait monter dans un bureau du premier étage, où il a été interrogé (son nom, le nom de ses parents, les raisons de sa présence pendant la manifestation). Il a été accusé d’être islamiste. Oussema et l’un de ses amis qui avait été arrêté avec lui ont été relâchés au bout de 4 heures, après s’être faits confisquer leurs effets personnels (papiers d’identité, caméscope, téléphone portable). Ils se sont ensuite rendus aux urgences de l’hôpital Habib Thameur où Oussema s’est vu délivrer un certificat médical prescrivant 7 jours de repos, et son ami 10 jours. Il est retourné quelques jours plus tard à Bab Bahr pour demander la restitution de ses affaires mais cela lui a été refusé.

Bassem Bouguerra: Ingénieur chez Yahoo tabassé en Tunisie
Bassem Bouguerra, cyber-activiste (et ingénieur chez Yahoo, NDLR), a participé à la manifestation du 6 mai. Il a été interpellé puis frappé à coups de pieds et de bâtons par des policiers en uniforme sur l’avenue Habib Bourguiba, alors qu’il commençait à filmer avec son téléphone portable le passage à tabac d’un caméraman par huit autres policiers en civil, lors d’une manifestation anti-gouvernementale encadrée et réprimée par un important dispositif mis en place par les forces de l’ordre. Lors de son agression, le portable de Bassem Bouguerra a été écrasé au sol. Ayant par la suite réussi à quitter les lieux, il a de nouveau été agressé par un policier, alors qu’il tentait d’expliquer les faits à des journalistes de la chaîne NBC. Ce policier en civil l’a notamment attrapé par son écharpe, avant de faire appel à d’autres policiers.

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Après que Bassem Bouguerra est parvenu une seconde fois à fuir ses agresseurs en se réfugiant sur un toit pendant vingt minutes, il a été placé de force dans un fourgon par des policiers en uniforme qui l’attendaient en bas du bâtiment. Il a été tabassé à coups de poings et de matraques, insulté et menacé de mort à l’intérieur du véhicule, avant d’être relâché. Bassem Bouguerra a annoncé son intention de porter plainte contre ses agresseurs.

Najib Abidi : Bras cassé pour le militant de la liberté
Najib Abidi, jeune blogueur et membre de l’Observatoire de la liberté de la presse, de l’édition et de la création (OLPEC), a participé à la manifestation du 7 mai. Selon son témoignage, recueilli par les chargés de mission, la manifestation se déroulait pacifiquement et les policiers s’adressaient à la foule avec des mégaphones en invitant les participants à manifester pacifiquement. Les policiers étaient cependant agressifs et sont intervenus brusquement et violemment pour disperser la manifestation. De nombreux manifestants ont, de peur, pris la fuite et se sont dirigés en courant vers les rues adjacentes. Ils ont été pourchassés par les forces de sécurité. Najib Abidi a été intercepté au niveau de la station de métro République par trois policiers en uniforme et cagoulés. Il a alors été roué de coups et Najib a pu voir autour de lui de nombreux autres jeunes être frappés après avoir été interceptés. Il a pu constater la présence de policiers en civil, cagoulés et armés de bâtons et de matraques qui participaient aux agressions. Il a ensuite été emmené à l’hôpital Mohamed Kassab par des passants, où a été diagnostiquée une fracture ouverte du bras résultant des coups reçus. Les médecins hospitaliers ont refusé de lui délivrer un certificat médical, mais son bras était encore dans le plâtre lorsqu’il a rencontré les chargés de mission de la FIDH, le 20 mai.

La réticence des services hospitaliers à délivrer des certificats médicaux est une pratique récurrente selon la LTDH et le CNLT, qui sont intervenus à plusieurs reprises auprès de différents hôpitaux de Tunis, en particulier auprès de l’hôpital Charles Nicole, pour obtenir des certificats médicaux permettant aux victimes de faire valoir la réalité des blessures occasionnées par les coups reçus.

Source : FIDH.org

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