Tunisie, cimetière du journalisme

 

«Dégage» a retenti un peu partout. Les poings ont été levés. Les réformes ont touché au secteur politique, économique et même à l’appareil sécuritaire de Zaba. Mais le journalisme assassiné est loin d’être ressuscité. Coup de gueule.


Ça parle d’économie, de diplomatie et d’emploi. Alors que les mots ne sont pas encore réincarnés. La faucheuse qui a assassiné la liberté d’expression, à l’ère de Ben Ali, sévit encore. Le spectre de l’opportunisme, du lèche-bottisme et de la propagande hante encore les colonnes des journaux, les télés et les ondes des radios. Dans une épicerie du coin, chacun doit gratter sa part. Il faut le faire même s’il n’y a pas de gâteau. La galette sera toujours bouffée par les mêmes tant qu’ils existent.

 

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«C’est des collègues» diraient les défaitistes. Réflexe de «Hitiste*» oblige. De l’autre côté, les plus impliqués pensent tout bas : «il ne faut pas cracher dans la soupe». Aujourd’hui, c’est malheureusement toujours leur saison. Ils continuent à raconter des salades au lectorat. Et c’est ce que nous combattons : les salades. Il s’agit même de notre pire ennemi.


Mettre son grain de sel à une salade verte peut faire en sorte qu’elle vire au verdâtre, voire au glauque. Alors, ayyouha el fata, fa99es 3adhma*. Surtout que la cerise est déjà sur le gâteau. Ceux qui cherchent leurs épices dans les eaux glauques font aujourd’hui de la plongée sous-marine. Tous les journalistes n’ont pas les mains sales.


Fakir d’idées, bourge des mots insensés, noble de démagogie se retrouvent sous les spots sans cesse. Et ça blesse les fesses de la masse. Le mainstream n’est plus de la frime. C’est de la dope. Les cimetières des mots sont encore impénétrables. La réincarnation est tellement difficile. L’appel à la prière des morts résonne toujours dans nos contrées.


Son premier diktat : Ne touchez pas au fruit défendu. Touchez le fruit fondu sous les canines des cannibales. Allez jusqu’à faire du bouche à bouche. Les spécialistes du frotti frotta sont à votre disposition. Faites recours à l’expertise des câleurs du bus. C’est l’heure des cunnilingus. Vous trouvez ces mots trash? Oui, mais comment parler de prostitution médiatique avec un vocab clean. Tremper sa queue dans les affaires des autres ne nous ressemble pas. Dans ce cas, pourquoi tremper les queues des autres dans nos affaires ?


Il faut que chacun braque sa braguette face aux tempêtes, arrose les falaises et soulage ses malaises. Mais les vents d’orient, d’occident et du propopompom nous asservissent. Demandez à Ahmed Ounais. Lui, il en sait quelque-chose. Pour rompre avec nos vices, il faudrait qu’on ferme nos gueules. Les cimetières des mots sont nombreux. Enterrer les morts n’est que bénédiction pour leurs esprits et un remède aux maux de leurs âmes errantes.


Enterrons les et qu’on n’en parle plus. Autrement, ce ne serait que de la fouille dans les cercueils. Et ce n’est pas la bonne saison pour la cueillette des os vermineux. Il ne fait pas chaud. Ce n’est pas encore la saison de la fripe, des glaces, de la tasse et de la table basse. Nous sommes plutôt en pleine saison de la foutaise. Si on en profite pas en contribuant à creuser la tombe des mots morts, on sera classé parmi ceux qui n’ont pas leur part au gâteau ni au beurre. Et si tu n’as ni le beurre ni l’argent du beurre, tu meurs.


Thameur Mekki

 

*Hitiste : un terme utilisé pour désigner les chômeurs notoires collant leurs dos aux murs des quartiers.


* ayyouha el fata, fa99es 3adhma : Clin d’œil au sens de l’humour de la blogosphère tunisienne. Le blog : Koujina de Chef Abbes

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