JCC 2015 : Film «A peine j’ouvre les yeux», une nouvelle Hend Sabri est née

La projection des films tunisiens de la compétition officielle des JCC 2015 a démarré avec la projection du 1er film de Leila Bouzid « A peine j’ouvre les yeux » qui a reçu plusieurs prix à l’instar du Prix du Public et le prix Europa Cinema au festival Venice Days en septembre 2015 et le Bayard d’or au festival de Namur.

Si ce film réveille un sentiment de déjà vécu chez plusieurs Tunisiens de par le traitement de la répression au temps de Ben Ali, qu’on a toujours voulu cachée, on peut facilement le classer comme docu-fiction tellement il traite avec justesse une période de l’histoire de Tunisie qu’on relate rarement au cinéma…

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Un regard sur Tunis, quelques mois avant la révolution

Le film nous plonge au cœur d’un été tunisien de 2010, quelques mois avant l’éclatement de la révolution, tout en lançant des clins d’œil aux agitations qui sévissent déjà au bassin minier de Gafsa. La réalisatrice nous invite à suivre les fougues d’une jeune adolescente de 18 ans, Farah, qui vient d’obtenir son bac avec mention. Quand sa famille la voit déjà médecin, elle préfère se consacrer à la musique avec son groupe de rock engagé…

Insouciante, Farah dénonce l’état policier, la misère en Tunisie et veut passer à travers le micro des messages audacieux au temps ou tout le monde disait que tout va bien.

L’audace du groupe qui tente de percer en se produisant dans les salles tunisiennes lui vaut d’être fiché et suivi par la machine policière au point d’être menacé et que ces menaces se sont concrétisées.

C’est peut-être l’une des premières fois qu’on voit une scène d’interrogatoire sur une jeune fille dans un poste de police tunisien, sur grand écran… Celui qui visualise le film s’attache inconsciemment à Farah mais se retrouve surtout à partager l’angoisse de sa mère qui frappe à toutes les portes pour libérer sa fille…

De la fille à la mère, migration du premier rôle

“A peine j’ouvre les yeux” a permis de faire découvrir 2 actrices talentueuses qui bouleversent les cinéphiles tout au long du film. Ghalia Ben Ali plus connue en tant que chanteuse et qui joue le rôle de la mère protectrice « Hayet », et Baya Mefhaffer la révélation du long métrage.

Agée à peine de 18 ans, aussi bien dans le film que dans la vie, celle qui marche dans les chaussures de « Farah » reflète une adolescente gâtée et assoiffée de liberté. Farah est effrontée et s’oppose à l’autorité de sa mère crevant l’écran avec sa fraîcheur, son innocence et inconscience. Cette envie de protéger les valeurs et de profiter d’une vie bohème et sans interdits ne tardera pas à lui causer de grands problèmes.

Si la première partie du film est principalement basée sur la vie de cette bachelière qui veut faire de la musique sa raison de vivre, la réalisatrice a donné graduellement plus d’importance à la mère pour nous faire découvrir un personnage qui n’est pas si loin de sa fille mais que les années ont assagie. Hayet a aussi connu sa période bohème et de liberté, elle en a souffert, du coup elle projette toute sa peur sur Farah…

La musique comme fil conducteur

Tout au long de « A peine j’ouvre les yeux » l’accent est mis sur la musique. La réalisatrice avance la musique comme véhicule de messages et un outil que le système craint fortement. Le groupe autour duquel se développe le film est un groupe de Rock arabe qui veut chanter ses propres textes.

«La musique est venue assez rapidement car c’est vrai que la chanson est quelque chose qui est très difficile à contrôler pour un Etat… c’est quelque chose qui peut avoir une force très puissante et se propager très vite, donc c’est vrai qu’assez vite la musique était une évidence et qu’on avait envie qu’on soit emporté et qu’on parte avec elle», déclare Leila Bouzid.

Et ce fut le cas du début à la fin du film, la musique s’est imposée comme outil de délivrance et comme remède pour dépasser ses maux, et une brèche à laquelle on s’accroche pour essayer d’avancer.

Vous pouvez encore regarder le film « A peine j’ouvre les yeux » de Leila Bouzid durant les JCC le mardi 24 novembre au Théâtre municipal de Tunis. Il sera disponible dans les salles tunisiennes à partir de janvier 2016.

Sara Tanit

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