Tunisie : Oubliez l’université, la solution, c’est la télé !

Nos internautes s’intéressent encore de très près à l’université. Mais que valent encore les diplômes sur un marché du travail constipé ? Faut-il pour autant désespérer ? Les téléspectateurs attentifs auront retenu les recettes à suivre pour avoir une baraque de rêve, et la bagnole qui va avec.

Google est sans équivoque. Les jeunes Tunisiens en général et les internautes en particulier s’intéressent encore de très près à l’université. Dans le Top 10 des recherches effectuées les 7 derniers jours, on retrouve pas moins de 5 fois les termes «orientation» et «inscription». Mieux : exception faite de la 2ème place, les 6 premières positions sont squattées par l’orientation universitaire et son  site tunisien corollaire. C’est dire que nos jeunes continuent, contre vents et marées, à rêver de diplômes et de lendemains qui chantent.

Reste à savoir ce que valent encore les titres universitaires sur un marché du travail congestionné, constipé, qui ne digère plus les diplômés. Et pour cause : il paraît que même au niveau international, nos universités n’ont plus le rayonnement d’antan. Loin de nous l’idée de désespérer les étudiants et leurs futurs condisciples. Loin de nous l’idée de les encourager à s’inscrire sur la page Facebook dédiée aux «chômeurs diplômés tunisiens». D’ailleurs le groupe en question ne semble guère être apprécié vu le petit nombre (83)de fans ici rassemblés. Brûler ? N’y pensez plus.

«Le taux de chômage des bac +8 est inquiétant» s’est même permis de titrer «Le Figaro» (édition du 4 août 2010). Et il s’agit là d’un quotidien français (très) conservateur, qui n’a (vraiment) rien du brûlot révolutionnaire. Comme quoi ceux qui caressent l’idée de filer à l’anglaise, en d’autres termes, de rejoindre les cohortes des grands brûlés de la clandestinité, devraient choisir une autre destination. Et puis si nos grands frères français n’arrivent pas (réellement) à déboucher les canaux de l’emploi de leurs diplômés, on devrait pour le moins trouver quelques justifications à nos petites perturbations tunisiennes.

Faut-il pour autant désespérer ? Certainement pas. Jamais nos télés n’ont proposé autant de solution à tous les (menus) problèmes de nos concitoyens. Les séries et les feuilletons ramadanesques finiront par porter leurs fruits. A force de voir ces exemples à la télé, les jeunes sauront quelles sont les valeurs les plus porteuses en ces temps dits «modernes». Les plus attentifs auront retenu les recettes à suivre pour avoir une baraque de rêve, et la bagnole qui va avec. Et d’ailleurs, dans leur clairvoyance, nos scénaristes sont sans équivoque. Aucune réussite n’a pour origine un cursus universitaire. Les internautes sauront en tirer les conclusions et poser les bonnes questions : à quoi sert-il encore de googler les termes «orientation» et «inscription» ? Encore des doutes ? Dans «Njoum Ellil 1», l’étudiant brillant, major de sa promotion, s’est fait arrêter, et a failli se retrouver en taule.

Encore des questions ? Les réponses sont claires. Et encore une fois, c’est notre télé qui a la réponse. «El haq maak» saura défendre vos droits. Aux plus impatients, aux plus ambitieux, restera le recours au Sandouk. Cette boîte magique télévisuelle qui permet aux plus persévérants de décrocher le jackpot, sous les yeux émerveillés et envieux de 10 millions de leurs compatriotes. Et en toute légalité, s’il vous plaît, sans prendre les risques conseillés in fine par les producteurs de nos feuilletons. Ce qu’il faudra, donc, c’est prier pour que cette émission aux nobles visées revienne. Rejoindre la page facebook  de «Dlilek Mlak» (qui ne rassemble pour l’instant que 26 membres), pourra accélérer le processus. Les réclamations de nos facebookeurs pourraient faire réapparaître cette émission, et lui offrir la place qu’elle mérite, dans notre panthéon audiovisuel. «Ahna hakka» propose même «50 mille dinars à empocher», en répondant à «des questions simples et faciles». Oubliez donc l’université, les examens, les révisions, et même l’orientation : la solution, c’est la télé !

Lotfi Ben Cheikh

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