Tunisie : Sidi Hsin Sijoumi, les vidéos de la colère

«En hiver, on doit faire face au froid et à la boue. En été, à la chaleur et aux moustiques. Même les moyens de transports sont inexistants : il n’y a ni bus ni taxis ! Ces derniers n’oseront d’ailleurs jamais s’aventurer ici, de peur de se faire braquer». Témoignages chocs sur les conditions de vie à 7 kms de Tunis, pour des vidéos réalisées par Slim Ayadi.

sidhsin-140711Des montagnes de détritus jouxtant une mosquée, des rigoles d’eau polluées sillonnant les rues encombrées de boue et de plusieurs tonnes de déchets …bref, une décharge à ciel ouvert où les émanations d’odeurs fétides et les incinération sont devenues le lot quotidien du quartier populaire de Sidi Hsin Essijoumi, dans la localité de Harairia. Un quartier qui se trouve pourtant à moins d’une dizaine de kilomètres de Tunis. Une situation sanitaire déplorable que les habitants déplorent pourtant depuis des années et face à laquelle les autorités ont ignoré depuis toujours. Et visiblement, les responsables continuent jusqu’à présent à faire la sourde oreille ! Face à ce constat, Slim Ayadi un journaliste citoyen, a décidé d’alerter l’opinion publique en postant plusieurs séquences vidéo sur le web qui montrent clairement la détresse et le raz-le bol des habitants de cette délégation.

Journalisme citoyen, tel est le nom de la page Facebook à travers laquelle Slim Ayadi a décidé de révéler au grand jour, les conditions précaires de ce quartier populaire de la banlieue Ouest, qui semble à des années lumières des huppés rivages de la banlieue nord. Une série de vidéos ont ainsi été publiées sous l’intitulé sarcastique «I love Sijoumi». Des témoignages chocs présentés par celui qui les a recueillis, comme des «braquages civilisés pour avoir le droit de s’exprimer». Slim Ayadi met ainsi Facebook à contribution pour dévoiler ce que les médias classiques continuent de passer sous silence. Qui a dit que les Tunisiens naissaient tous égaux ?

Une infrastructure sanitaire quasi-inexistante liée à une absence (délibérée?) des services d’hygiène et de propreté, un manque de moyens de transports, de sécurité. C’est ce dont souffrent en partie les habitants de Sidi Hsin Essijoumi. Surtout que la situation n’est guère près de s’arranger, malgré les innombrables appels à l’aide des habitants de ce quartier aux allures de no man’s Land. «On a essayé tous les recours possibles : le maire, le délégué, le ministère…mais aucun ne nous a écouté» dixit Mohamed, un habitant du quartier exaspéré. Il ajoute «En hiver, on doit faire face au froid et à la boue. En été, à la chaleur et aux moustiques. Même les moyens de transports sont inexistants : il n’y a ni bus ni taxis ! Ces derniers n’oseront d’ailleurs jamais s’aventurer ici, de peur de se faire braquer ! » On n’ose imaginer le sort d’une femme enceinte ou d’un malade…

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Pire, toujours selon Mohamed, les habitants n’iront jamais voter pour les élections de l’assemblée constituante ! La raison invoquée ? « Il y a quelques années, le gouvernement de Ben Ali avait décidé d’attribuer des noms à chaque rue (autrefois numérotées) .Ce qui suppose que chaque citoyen de ce quartier doit aller mettre à jour sa carte d’identité nationale au poste de police ! Sauf que pour obtenir cette dernière, ils doivent au préalable se rendre à la municipalité qui leur fournira un certificat de numérotation ! Comble de l’ironie : ledit certificat ne sera délivré qu’à la seule condition de s’acquitter de la taxe de la voierie ! En d’autres termes : Si un citoyen désire voter, il devra payer en plus 140, 180 ou 200 dinars !».

Un autre habitant, un jeune cette fois, explique pourquoi les transports en commun ont disparu : «Cela est dû à la route principale allant vers Medjez EL Bab. Depuis 3 ans, elle est devenue impraticable à cause de travaux mal entrepris liés à des problèmes d’étanchéité des canalisations d’eau. Résultat des courses : deux lignes de bus n’assurent plus la liaison entre les quartiers Essijoumi et celui du 20 Mars ! ».

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«L’autre jour, durant une soi-disant visite officielle d’un ministre, on ne nous a même pas autorisé à l’approcher afin de dialoguer ! Il a fallu qu’on le poursuive en voiture pour l’approcher !!! » lâche un énième habitant lassé de l’indifférence totale des autorités!

Et quand le journaliste l’interroge sur les conditions de vie des élèves et des écoliers, il lâche furibond « Ils sont tous voués à devenir des délinquants où des criminels ! Pas étonnant vu qu’ils n’ont aucune condition de vie décente. En première année primaire, ils boivent déjà de l’alcool. L’année suivante, ils fument des joints ! ».

Un autre, se demande de son côté, comment les gens pourront entamer le mois de Ramadan qui approche à grands pas ! « Figurez vous qu’on est obligé de louer des traxs avec notre propre argent afin que les poubelles n’envahissent pas l’entrée de la mosquée ! ».

Autant dire que les témoignages recueillis par Slim Ayadi, un journaliste-citoyen engagé, risquent de faire du bruit. En espérant qu’ils permettront de contribuer à sonner l’alarme et à améliorer le sort de nos concitoyens laissés pour compte.

 

S.B.N

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